Ici, vous trouverez Trio, un roman de Xan, qui fut publié entre janvier et mars 2010 sur www.xantate.com


vendredi 5 février 2010

Trio - Chapitre 5

  Comme promis! Le chapitre5! Bonne lecture!


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 Le sommeil ne m'a accordé sa présence que quelques heures, puis il m'a fui pour de bon. En ce début d'après-midi, je suis en extérieur, j'arpente sans relâche l'extérieur de la ville. Je cherche à me fatiguer, à ne pas penser, à ne pas ressentir la nervosité de l'attente, ni l'exaltation qui augmente. Mon ventre se tord, et mon cœur bat plus fort en parallèle, si bien que j'ai l'impression d'être tiré dans deux directions opposées. Je ne veux pas contrer une panique par la violence, et je recherche la paix qui m'est nécessaire. Cela fait des années que je n'avais pas ressentie cette bête à l'intérieur de moi, qui souhaite sortir, mordre et régner en maître.
  Je marche dans la forêt, je travaille ma respiration en me focalisant sur mes pas, sur les chants rares des oiseaux, sur le vent doux qui fait danser les feuilles. Progressivement, je sens que je me calme, même si mon cœur bat toujours à un rythme trop élevé. J'ai peur pour Fiana et Jiono aussi. Serons-nous capable de tuer la créature? Serais-je capable de dépasser ma peur pour les protéger? J'ai réussi à la blesser, même si j'ai été blessé en retour. "La peur est une arme à part entière pour elle", c'est ce que l'inconnue m'a dit, et c'est peut-être le principal ennemi ici.
  Arrivé au plus profond de la forêt, là où la ville n'est qu'une idée éloignée et saugrenue, je choisis un grand arbre, attrape une branche basse et me hisse à la force des bras. De branche en banche, j'arrive suffisamment haut pour pouvoir me confondre avec la nature. Je m'adosse au tronc, assis sur l'un de ses larges bras, les jambes pendantes dans le vide, et je ferme les yeux. Je ne peux pas prétendre que j'entends l'arbre, ou que je sens la vie qui y circule, mais le contact et l'odeur de l'écorce sont un plaisir. Immobile, j'ai envie de me fondre dans l'arbre, de devenir un membre à part entière de cette forêt, d'en être un esprit, acteur de cette communauté vivante et paisible.
  _ Je ne me suis jamais sentie aussi bien que dans un arbre.
  Oh oui! Je sursaute, et je manque de peu en tomber. J'enroule les jambes autour de la branche pour ne pas chuter. Je lève la tête. A deux branches de moi, à un emplacement que je n'avais pas vu auparavant, une personne se tient, comme moi. Des pieds nus se balance dans le vide, et les jambes découvertes sont manifestement féminines. La personne est cachée par la branche, mais elle se penche vers moi pour me voir. Je ne mets que quelques instants pour la reconnaître. Alnia.
  _ Alors, tu as perdu ta langue?
  Elle est pleine de vie, sa voix légèrement espiègle. Avant que je ne réponde, elle quitte sa branche et se laisse tomber sur la mienne. Je n'ai qu'à peine réalisé ce qu'elle faisait, mais ma respiration se bloque et je la regarde comme si une deuxième tête venait de sortir de sa nuque.
  _ Tu es folle?
  La question sort d'elle-même, d'une voix calme, incrédule.
Son rire raisonne comme le chant des fleurs prises dans le vent au crépuscule. ... D'où est-ce que cela me vient, ça?
  _ Oui et non, non et oui. Tu crois que je suis folle? Tu as envie de me savoir folle?
  Elle se penche d'avant en arrière, les deux mains sur l'écorce, les jambes balançant dans tous les sens. Elle porte un vêtement sans manches, et un pantalon qui s'arrête au dessus des genoux. Ses muscles sont aussi bien dessinés que ceux de ma sœur, peut-être même plus. Comme je m'en étais fait la réflexion, cette jeune femme cache une athlète. Serait-elle l'héritière d'un style de combat? Je me rends compte qu'à trop réfléchir on ne parle pas assez. Je lui adresse un sourire.
  _ Si tu es folle parce que tu montes dans les arbres, je suis fou moi aussi.
  Elle se penche vers moi pour me regarder dans les yeux, son visage à quelques centimètres du mien. Oui, je suis mal à l'aise, mais je ne détourne pas le regard pour autant. Ce n'est pas dans mes habitudes.
  _ Tu n'as pas les yeux d'un fou. A vrai dire, tu caches bien ce que tu as à l'intérieur. Mais la rigidité n'est pas une barrière parfaite, fais attention avec toute cette colère.
  Elle est sérieuse. Et... Comment est-ce possible? Est-ce qu'elle lit en moi en me regardant simplement dans les yeux? Je me recule légèrement pour m'éloigner d'elle, et elle me sourit comme si de rien n'était. Qu'a-t-elle vraiment vu?
  _ Tu ne me crois pas? Attends, je vais te montrer!
  Incrédule, je vois son sourire s'élargir de plus en plus, alors qu'elle lève négligemment un bras. Je sais que je devrais faire quelque chose lorsque les muscles de son bras se contractent, que son poing se ferme, et qu'il fond sur moi. Je l'évite en parant du bras. Le coup me fait mal, et la pression me fait perdre l'équilibre sur la branche. Les jambes accrochées, je pivote et plonge vers le sol. Mes bras s'accrochent à une branche avant de tomber bien bas, mais mon instinct me parle d'un danger, encore. Tournant la tête, je la vois pendue la tête en bas, ses jambes comme seules retenues, elle lance une autre attaque. Ok, en fait, elle est belle, et bien folle.
  Si elle joue comme ça, je ne vais pas me laisser faire. Je me contracte, reçoit un coup de poing que mes muscles abdominaux absorbent, même si moins bien que je n'aurais voulu, et je lève les jambes. Je l'attrape au torse, et la décroche de sa branche, la projetant vers le bas. Elle se réceptionne comme un écureuil, et parvint à me tenir une cheville. Elle tire comme une forcenée, mais je tiens bon, jusqu'à ce qu'elle se jette dans le vide comme si elle tenait une corde. La surprise décontracte mes bras, et je tombe. Je me cogne le torse à une première branche, et j'ai le souffle coupé. Ensuite, je sens que ma jambe est libérée, mais mon dos cogne à son tour. J'ai la vue qui se trouble d'un coup. Lorsque je réagis enfin et que je tends les mains pour attraper une prise, il est déjà trop tard, et le sol m'accueille. Un tapis de feuille aurait été le bienvenu, mais la saison n'y est pas. La douleur est fulgurante, et l'absurdité de la situation l'amplifie plus encore.
  Sans m'en rendre compte, je suis sur mes pieds, et je vois Alnia atterrir gracieusement au sol. Tu crois que tu peux me faire ça et jouer à la princesse acrobate? Silencieusement et rapide comme un furet, je fais trois pas et lance un coup de pied qui aurait ébranlé l'arbre s'il avait été ma cible. Elle pare de ses deux bras, mais je sens qu'elle n'a pas aussi bien absorbé l'impact qu'elle l'aurait voulu, et elle fait un pas en arrière. Ce signe de faiblesse est tout ce qu'il me faut pour me faire vouloir affirmer ma position. Un même coup la fait reculer plus encore, et je tente de lui faucher les jambes pour la faire tomber à terre. Elle saute pour éviter le coup, et riposte en me sautant dessus, toutes griffes dehors. Elle ne me laboure pas le visage, mais elle plante les doigts durs comme du bois dans mes épaules, m'engourdissant les bras. Elle m'a directement attaqué les nerfs! Je crie lorsque je frappe de la tête. Surprise, elle se prend l'impact sans réserve et tombe à mes pieds. Un coup de pied l'envoie rouler sur quelques mètres, et je suis déjà sur elle. Je crie à nouveau, mais elle roule pour éviter mon poing, qui se plante profondément dans le sol, envoyant de la terre en tous sens. Viens ici... Je ne coupe pas le mouvement, et projette de la terre dans sa direction, pour l'aveugler. Elle ne bouge pas lorsque j'arrive sur elle et n'évite mon coup d'épaule que par une fuite désespérée. Cela dit, je laisse traîner une jambe sur le côté, et elle trébuche dessus, tombant avec un faible cri.
  Avant que je puisse frapper pour en finir pour de bon, elle se relève avec une vitesse que je n'aurais cru possible, et me saute une nouvelle fois dessus. Cette fois, elle m'entoure de ses bras, et s'agrippe à moi comme si elle voulait ne plus jamais me lâcher.
  _ Calme toi!
  L'ordre est direct, sans violence, intolérable, et parfaitement cohérent. Je me secoue comme pour me débarrasser d'un parasite, mais je réalise tout d'un coup ce que j'ai failli faire. Mes jambes me lâchent, et je tombe sur les fesses, elle toujours verrouillée sur moi.
  _ Calme toi...
  Je reste abasourdi. Que vient-il de se passer exactement? Elle m'a attaqué, elle a manqué me faire tomber d'une dizaine de mètres, et je l'ai attaqué en retour, pour supprimer la menace. J'ai voulu la tuer.
  Sa voix est comme une plainte maintenant.
  _ Je suis désolé... Je ne pensais pas que tu cachais tout ça...
  Elle parle de quoi? De la violence en moi? Elle voulait voir, et n'avait pas cru qu'elle serait confronté à ça? Comment se fait-il que j'ai perdu autant mon contrôle?
  Je sens qu'elle relâche sa prise sur moi. Mais je ne la laisse pas partir. J'enroule mes bras autour d'elle et la maintient fortement. J'éclate en sanglots. Qu'est ce que...? En retour, elle ne me lâche pas finalement. Je crois qu'elle me parle, mais je ne comprends pas les mots, si ce sont vraiment des mots.
  Mon visage est noyé contre elle, mais j'ai des images qui défilent dans ma tête. Des images, des souvenirs, des peurs, que je ne veux pas voir, dont je n'ai pas envie de me souvenir, qui me font mal. Et que j'absorbe. Mes parents, ma solitude, ma violence, Jiono et Fiana qui sont ma famille sans être le soutien que je voudrais, les morts que j'ai vus, la créature monstrueuse, à laquelle j'ai peur de ressembler.
  Merci à toi... Merci de me permettre de ne pas parler. Merci de m'avoir poussé à bout, même si tu ne comprends pas, même si je ne comprends pas pourquoi tu l'as fait. Merci de me parler sans rien me demander. Merci de me serrer aussi fort, moi qui n'ai pas eu de contact physique intime depuis que ma mère a disparu.
  _ Merci...
  Ce mot est exprimé plus tard, tellement plus tard que la lumière est basse, que la température est bien plus fraîche, même si l'un contre l'autre, cela nous indiffère. Mes yeux sont gonflés, je le sens. Lorsque je m'écarte d'elle, enfin ou malheureusement, elle ne dit rien, elle sourit un peu.
  _ Tu n'es pas beau à voir.
  En retour, je ne peux pas lui dire l'équivalent. Je n'aime pas mentir, et je suis incapable de faire de l'humour à ce moment. Mais je ris doucement malgré tout.
  _ Je ne voulais pas...
  _ Ne dis rien. Je ne suis pas faible, et j'ai cherché cette réaction en toi. Je pensais juste être plus forte. Ce n'est pas tous les jours que je rencontre une personne qui peut me mettre en difficulté.
  J'avais donc bien supposé, elle fait partie d'une école martiale. Ses yeux ont des reflets étranges, qu'ils n'avaient pas plus tôt dans la journée. Ils ont quelques touches dorées, vertes aussi malgré leur couleur marron habituelle. Je vois des éclats de rouge également, et l'ensemble est déstabilisant. Fascinant.
  _ Je veux te parler... Je n'ai personne à qui parler... Mais je dois aller aider mon frère et ma sœur. Une créature est en liberté et doit être neutralisé.
  Ai-je bien vu? Ses yeux se sont colorés de vert, puis de rouge à la mention de la créature, avant de redevenir marrons. Son visage s'est fermé. Et elle m'a adressé un sourire, triste, tendre... Inconsciemment, j'ai fait une chose que je n'ai jamais fait auparavant. Je l'ai embrassée, doucement, sur les lèvres, et j'ai senti qu'elle répondait, que pour elle, l'acte avait le même sens.
  Qui es-tu? Je ne veux pas croire que tes yeux rouges soient ton identité, mais je ne te laisserai pas non plus en liberté si ton âme est noircie.
  Alors que je quitte la forêt, je n'ai qu'une seule envie, retourner auprès d'elle, et lui parler, la tenir dans mes bras, l'embrasser, partir loin avec elle, ou rester à tout jamais dans nos arbres. Seras tu là si je reviens? Répondrais-tu comme tu viens de le faire?




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  Et voilà, un chapitre de plus! Alors, alors??? J'avoue, je confesse, je l'aime celui là. J'aime ces deux personnages. Et une scène d'intimité chaste est toujours émouvante pour moi. (Désolé pour le clan des Yaoi, j'espère n'avoir grillé ni vos yeux ni vos imaginations débordantes!)
  Un grand merci à vous qui me lisez, si vous êtes vous-même 'créateur', vous savez ce que cela représente.
  Et puis, un grand merci tout particulier à Mlle Lae, qui assure la bétalecture. Oui! Quelqu'un a le privilège de lire avant tout le monde, mais c'est du boulot, j'ai une faiblesse en orthographe! Merci à toi, ton travail a une grande valeur à mes yeux!
   Prochain chapitre? Je n'en dis pas plus, je suis pas sûr de savoir moi-même son contenu! Le bébé a une vie propre, et il pousse, il pousse!


  Xan

2 commentaires:

  1. très belle façon de tomber amoureux <3
    j'adore tes scènes de combats, sont très bien décrites, moi j'ai toujours un peu de mal avec les scènes d'action, je préfère quand ça cogite ( interdiction de rire !! -_- )
    c'est marrant j'ai l'impression que cette relation va faire très mal XD

    Gali <== t'as vu ? XD

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  2. MDR, le clan Yaoi !!!

    Ce serait vraiment elle la créature ? Je suis trop forte! Ah oui, bêtalectrice, je connais aussi, j'en suis une (même si j'ai encore du progrès à faire parce que y a toujours deux trois fautes qui me rien au nez et ça m'énerve).

    Toi aussi, le bébé devient rebelle ? C'est pas croyable, ça,hein ?


    En tout cas, c'est une jolie scène d'amour même si je trouve que ses sentiments de la fin sont un peu trop rapides.

    Yeah, j'ai lu deux chapitres dans la même journée, un record! Je vais essayer d'ne lire un 3è si j'ai le temps avant de partir mais en fait, j'écris en même temps, c'est pour ça ^^"

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